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Debra Paget et Elvis dans le film Love Me Tender, 1956


Au milieu des années 50, il incarnait le rock' n' roll, et la majorité des grandes vedettes qui suivirent prirent Elvis pour modèle. 44 ans après sa mort, il est plus populaire que jamais : sa succession reçoit plusieurs millions de dollars chaque année de la vente de ses albums, et un demi-million d'admirateurs continuent de se recueillir devant les grilles de sa demeure. La Recording Industry Association of America a remis à ce jour, pour ses albums, 101 disques d'or, 57 platines, 25 multi-platines et 1 diamant. Plus de 139 millions d'albums ont été vendu jusqu'à maintenant, seulement, aux États-Unis.

À propos de l'orthographe du deuxième prénom d'Elvis... c'est bien Aaron avec deux "a". Sur son certificat de naissance, Aaron est écrit avec un seul "a" : Aron. Adulte, Elvis a fait rectifier l'orthographe de son second prénom. Sur sa tombe est gravé Aaron. Aaron Kennedy était un bon ami de Vernon Presley, d'où le choix de ce prénom.

Autre temps… autre moeurs !!
Article paru dans L'Express du 29 juin 1956...
Rock and roll : La musique qui rend fou 


«Cette musique rend fou», disent les parents américains. A Boston, le clergé catholique a ordonné le boycott de «style indécent». A Hartford, le conseil municipal a envisagé de retirer sa licence au Théâtre d'État en raison du délire collectif qui s'était emparé du public pendant une série de concerts. Le chef de la police de Washington a demandé l'interdiction de ces concerts à la suite de bagarres au cours desquelles plusieurs personnes furent blessées. A Minneapolis, un directeur de salle retira de son programme un film musical qui avait incité un groupe de jeunes gens à parcourir les rues de la ville en dansant et en brisant des carreaux. Au cours d'un concert nocturne donné dans le stade d'Atlanta, des bouteilles de bière se mirent à voler dans le public et quatre jeunes gens furent arrêtés. 

Elvis Presley… 21 ans, ancien conducteur de camion et chanteur sans charme, laid, épais, vulgaire, beuglant ses chansons en les accompagnant de gestes si grossiers que les écrans de la télévision ne peuvent pas l'accueillir, est la nouvelle coqueluche des midinettes américaines. Merveille de mauvais goût, il a vendu cette année, pour plus de six millions de dollars de disques (deux milliards de francs) et vient de signer un contrat de sept ans avec Hollywood. 

L'objet de ces débordements d'enthousiasme est un nouveau style de jazz, le «Rock and roll» sur, lequel les adolescents américains trépignent d’un bout à l'attire des États-Unis. Le «Rock and roll», qui s'inspire directement des «blues» noirs, s'en distingue surtout par la monotonie lancinante de ses phrases musicales et par la vigueur de, son rythme, «si solide qu'on pourrait marcher dessus». Le public participe si activement à la musique que ses hurlements et ses battements de mains couvrent souvent la partie mélodique, ne laissant filtrer que les énormes pulsations du rythme. Les auditeurs les plus «possédés» dansent dans les travées. Le «Rock and roll» produit, de l'aveu même de ses détracteurs, un effet physique incontestable dont le caractère sexuel est évident. «S'il faisait ça dans la rue, a déclaré un policeman après avoir entendu et vu Elvis Presley, une des vedettes du genre, «je le coffrerais immédiatement». Consultés, les psychiatres se sont emparés de l'affaire. Selon eux, la situation n'est pas dramatique et le succès du «Rock and roll» s'expliquerait surtout par le besoin des jeunes de participer à un enthousiasme collectif dont la vie américaine ne leur offre pas l'occasion. Mais ce succès ne différerait guère de celui du swing à la veille de la dernière guerre on du «ragtime» en 1920. «Le «Rock and roll», a dit un psychologue, n'est pas plus dangereux pour la jeunesse que le «charleston.» Mais les parents américains - et les critiques musicaux - continuent cependant d'y voir surtout «une musique de voyous».